Les mathématiques de la NBA Draft Lottery

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Le verdict est tombé le 16 mai 2023 : les Spurs de San Antonio ont obtenu le premier choix de la draft de la NBA, une sorte de petit marché des transferts où chaque équipe pourra choisir à tour de rôle parmi les meilleurs espoirs du basketball. Il s’agit là d’un avantage certain pour les Spurs, qui pourront ainsi sélectionner le prometteur Victor Wenbanyama et l’intégrer à leur équipe.

Il faut dire que l’équipe, arrivée dernière ex aequo de la poule de Conférence Ouest, avait plus de chances d’obtenir ce premier choix que toutes les autres… Car oui, dans l’attribution de l’ordre des choix, tout n’est que hasard, et donc mathématique. Dans cet article, nous explorerons donc le fonctionnement de cette loterie et les mathématiques qu’il y a derrière.

L’influence du clasement

Revoyons donc le fonctionnement du classement de la NBA. Ce championnat de basket est divisé en deux conférences, Est et Ouest, chacun composés de 15 équipes. A l’issue de la première phase du championnat, les 6 meilleures équipes de chaque conférence seront qualifiés pour les Play-Off, un tournoi interne à chaque conférence. Les équipes classées de la 7ème à la 10ème position devront quant à elle passer une phase intermédiaire, les Play-In, à l’issue desquels deux équipes sont éliminées pour chaque conférence.

14 équipes restent donc sur le carreau (les 5 moins bien classés et les deux équipes éliminées en play-in pour chaque conférence). En guise de lot de consolation, ces 14 équipes participent à la loterie de la draft. Cette loterie aboutira à un classement des équipes qui déterminera l’ordre dans lequel celles-ci pourront sélectionner les joueurs disponibles lors de cette draft : les premières équipes pourront alors s’offrir les services des joueurs les plus talentueux du marché, une manière de rééquilibrer les débats, en quelque sort.

Ordre de passage

L’établissement de cet ordre de passage se base sur le tirage de 4 numéros, de 1 à 14. L’ordre de tirage n’important pas, il y a donc \(\dbinom{14}{4}\) possibilités – ce qui, en faisant le calcul, nous donne 1001 combinaisons possibles.

A l’issue de la première phase de championnat, les équipes sont classées en fonction de leur bilan, indépendament de leur conférence d’origine.

  • Les équipes qui terminent aux positions 30, 29 et 28 se voient chacune attribuer 140 combinaisons.
  • L’équipe classée 27ème se voit attribuer 125 combinaisons
  • L’équipe classée 26ème se voit attribuer 105 combinaisons
  • La 25ème équipe en reçoit 90
  • La 24ème équipe en reçoit 75
  • La 23ème équipe en reçoit 60
  • La 22ème équipe en reçoit 45
  • La 21ème équipe en reçoit 30
  • La 20ème équipe en reçoit 20
  • La 19ème équipe en reçoit 15
  • La 18ème équipe en reçoit 10
  • La 17ème équipe en reçoit 5

Ces règles d’attribution peuvent toutefois connaître certaines modifications en cas d’égalité entre plusieurs équipes lors de la saison régulière. Ce fut notamment le cas cette saison : les Chicago Bulls ont par exemple reçu 18 combinaions akirs que les Oklahoma Thunders en ont récupéré 17. Au total, 1000 combinaisons sont attribuées : seule la combinaison 11-12-13-14 n’est attribuée à aucune équipe.

Une première combinaison est alors tirée au hasard, pour décider de quelle équipe remportera le premier choix de la draft. S’il s’agit de la combinaison 11-12-13-14, alors le tirage est annulé, et on recommence. Sinon, l’équipe qui détient la combinaison sortante remporte ce choix.

On recommence alors pour le deuxième choix : une deuxième combinaison est ainsi tirée au sort. S’il s’agit de la combinaison 11-12-13-14 ou d’une combinaison qui appartient à l’équipe déjà tirée au sort, alors on procède à un nouveau tirage, et ce jusqu’à obtenir une combinaison valide.

Le principe est le même pour attribuer le troisième et le quatrième choix de la draft. Une fois ces quatre premières places attribuées, les places restantes sont données en fonction du classement des équipes : la moins bonne équipe restante sera la cinquième à choisir, la deuxième moins bonne sera sixième, et ainsi de suite.

Probabilités des premières places

Prenons le cas des San Antonio Spurs. De par son classement à l’issue de la saison régulière, les Spurs disposaient de 140 combinaisons. La probabilité qu’ils remportent le premier choix de la draft était donc de \(\dfrac{140}{1000}\), c’est-à-dire 14% (on rappelle que la combinaison 11-12-13-14 ne compte pas, il ne reste donc que 1000 combinaisons valides, voir bas de page).

Mais quelle était la probabilité qu’ils ne remportent que le second choix ? Tout dépend de l’équipe qui aurait obtenu le premier. S’il s’agissait des Houston Rockets, qui détenaient également 140 combinaisons, alors la probabilité de gagner le second choix pour les Spurs aurait été de \(\dfrac{140}{860}\), soit environ 16.27% – il n’aurait en effet resté plus que 860 combinaisons valides. Si, en revanche, le premier tour avait été remporté par l’équipe d’Orlando Magic (90 combinaisons), la probabilité pour les Spurs d’obtenir le second choix aurait été de \(\dfrac{140}{910}\), soit environ 15.38%.

Pour obtenir la probabilité d’obtenir le deuxième choix du draft, il faut alors recourir à la formule des probabilités totals. Notons alors \(A_{i,j}\) l’événement « l’équipe classée à la position \(i\) remporte le \(j\)-ème choix du draft ». Nous cherchons la probabilité de l’événement \(A_{28,2}\), les spurs étant classés 28ème au total. Le système \(A_{i,1}\), pour \(i\) allant de 17 à 30, est un système complet d’événements (il y a une et une seule équipe qui remporte le premier choix). D’après la formule des probabilités totales, la probabilité \(\mathbb{P}(A_{28,2})\) est égal à la somme des probabilité \(\mathbb{P}_{A_{i,1}}(A_{28,2}) \times \mathbb{P}(A_{i,1})\), pour \(i\) allant de 17 à 30. Après un petit calcul, on trouve que cette probabilité vaut environ 13.42%.

En reprenant ce principe pour la troisième place, on trouve que la probabilité que les Spurs obtiennent le troisième choix est d’environ 12.75%. Pour la quatrième place, cette probabilité est d’environ 11.97%.

Dans le cas où le classement à l’issue de la saison régulière serait sans égalité, les probabilités d’obtenir telle place dà la loterie sont données par le tableau suivant, issu de la page Wikipedia de la NBA Draft Lottery.

La loterie finit-elle vraiment ?

Un peu plus haut, j’affirmais que la probabilité poour les Spurs de remporter la première place était de \(\dfrac{140}{1000}\) alors qu’il y avait 1001 combinaisons possibles. Le raisonnement avancé était de dire que l’une des 1001 combinaisons entraînant un nouveau tirage, il suffisait de ne pas la compter pour déterminer cette probabilité… Mais la réalité est un peu plus complexe que cela. Ne pourrait-on pas tirer la combinaison 11-12-13-14 une infinité de fois, entraînant une loterie sans fin ?

Et cette probabilité n’augmente-t-elle pas au fur et à mesure que la loterie avance ? En effet, après le premier tirage, de nouvelles combinaisons aboutissent à un tirage invalide. Dans le cas de la loterie de 2023, 141 combinaisons étaient invalides après le premier tour, et ce nombre grimpait à 266 au tour suivant. La probabilité de tirer une combinaison invalide était alors de \(\dfrac{266}{1001}\), soit environ 26.57%… Autant dire que ce n’est pas rien.

On peut toutefois calculer la probabilité d’obtenir une suite de \(n\) tirages invalides : si la probabilité d’obtenir un tel tirage vaut \(p\) (avec \(p \neq 1\)), alors la probabilité d’obtenir \(n\) tirages invalides à la suite vaut \(p^n\). On en déduit que la probabilité de l’événement complémentaire (à savoir obtenir au moins un tirage valide en \(n\) essais) vaut \(1-p^n\) : cette probabilité tend vers 1 lorsque \(n\) tend vers \(+\infty\). Par exemple, on prenant \(p=\dfrac{266}{1001}\) et \(n=5\), on obtient que la probabilité d’obtenir au moins un tirage valide en 5 essais est d’environ 99.87 %. De quoi aborder sereinement cette loterie !

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